
“La peinture est une activité sale, érotique, brute et indéracinable.” – Nicola Samorì
Parfois, quand vous voyez les œuvres d’un artiste pour la première fois (même une seule) vous savez que vous allez directement accrocher… voir tomber raide dingue de son travail.
Et ce fut mon cas, quand j’ai découvert il y a maintenant de cela environ 4 ou 5 ans, l’univers de Nicola Samorì.
Une véritable claque visuelle qui reliait deux de mes mouvements artistiques favoris :
L’obscurité de l’art baroque avec la créativité de l’art contemporain.
Voici donc la présentation d’un des artistes qui rentrent facilement dans mon top 5.
Bio rapide
Nicola Samorì est né en 1977 à Forlì, en Italie. Ses parents étaient de simples fermiers, qui s’occupaient des champs et des animaux.
À l’âge de trois ans, il dessine un dinosaure qui n’existait pas, selon lui… avant que sa mère ne lui en achète une parfaite réplique dans un magasin de jouets.
Il comprend alors (inconsciemment) tout son “génie” artistique.
Il décide donc de l’exploiter par la suite en s’intéressant en premier lieu, à l’art de l’Égypte Antique, puis à l’Histoire de l’Art en général.
Entre-temps, il lit le livre La vie de Michel-Ange qui l’a profondément marqué.
Vers ses 20 ans, il découvre le vaste univers de l’art contemporain et décide d’en faire intégralement partie.
Les influences de Nicola Samorì
Ses plus grandes influences sont évidemment l’art baroque, les grands peintres flamands comme Vermeer ou Rembrandt, ou encore la grande époque de la renaissance maniériste.
Concernant l’art baroque, il remercie notamment Le Caravage d’avoir su “simplifier” l’espace sur une toile, et ainsi réduire l’overdose de détails que l’on retrouve (trop) souvent dans les arrière-plans…

Il reconnait par ailleurs qu’il est impossible pour un artiste contemporain de retrouver la richesse et la maitrise des couleurs des grands maitres passés :
“ Les couleurs ? Je ne sais pas quoi faire à part les admirer dans un musée. ”
Il trouve aussi que les peintres contemporains peuvent parfois faire preuve de véritables « paresses. »
Rien de surprenant là-dedans avec les nombreux choix, médiums et outils qui nous sont offerts aujourd’hui.
Les mouvements modernes restent tout de même une de ses plus grandes inspirations pour pouvoir créer le lien entre la technicité de grands maîtres de la peinture… et les idées abstraites/créatives apportées par l’art contemporain.
En particulier avec l’aide des travaux d’Alberto Burri (1915-1995) et Francis Bacon (1909-1992).
Une recherche dans la matière et la texture qui le suit dans chacune de ses œuvres.

Dans l’atelier de Nicola Samorì
Nicola Samorì commence toujours ses peintures avec un plan bien planifié, bien construit qui s’effondrent petit à petit… et laisse place à la créativité et ses talents artistiques au fil de la création.
Ses passe-temps se résument à peindre et à sculpter. Il ne connait aucune autre passion aussi dévorante.
Il peint sans écouter de la musique.
Le bruit strident des moulins à métaux qui sculptent le marbre ou le bruit de la poussière de pierre ponce qui se mélange au pigment suffit pour le faire rentrer dans un état de transe…
Excepté la nuit où il se laisse parfois entrainer par des sons électros.
Derrière le langage visuel apporté naturellement par l’art figuratif, l’atmosphère sombre et ténébreuse de Nicola Samorì nous amène à nous questionner sur notre statut… ainsi que notre utilité dans ce monde.
“ La blessure est le sujet principal dans toutes mes œuvres. ”
Ses œuvres représentent l’oscillation perpétuelle entre la guérison et la violence.
Sans jamais rentrer dans l’iconoclaste.
Mais toujours en restant un véritable amoureux de l’image.
En effet, Nicola Samorì préfère dévoiler au public l’intérieur de la cage thoracique du Christ et ses différentes parties, pour montrer ses blessures, avec l’aide de la matière et des textures.

Il trouve que cela permet d’éviter, et surtout de résumer cette figure emblématique à “un simple cliché religieux”.

Représenter la fragilité de chaque figure sur la toile ou une sculpture, telles une feuille desséchée ou des ailes de papillon, permet à Nicola Samorì de la protéger, pour que celle-ci ne s’effondre devant nos yeux…

C’est donc à chacun d’entre nous d’en prendre soin et d’y trouver le véritable message.
L’obscurité retranscrit à la perfection dans les œuvres de Samorì, est toujours accompagnée d’une lueur :
“ Ce n’est surement pas une coïncidence si les miracles et les visions sont toujours représentés par un rayon de lumière. Quand vous voyez une zone éclairée dans une peinture de maître, vous pouvez être certains qu’il s’agit d’un miracle. ”
Là où il y a les ténèbres, il y a forcément une lumière.
Pour Nicola Samorì, l’Art permet de stopper le temps. Il s’agit en soi d’une véritable forme d’exorcisme.
L’Art n’évolue pas comme peut le faire par exemple, la science.
L’Art se transforme. Et souvent, d’une meilleure façon que ce qui peut déjà exister.
C’est toute la force de l’Art.
Pouvoir arrêter le temps et créer son propre calendrier. On peut donc associer une œuvre à une année, un mois, un jour ou juste le temps d’une seconde. Nous pouvons aussi apprécier tous les efforts procurés par l’artiste dans son atelier, avant sa présentation au public.

Aujourd’hui, il est compliqué de créer un sentiment dans ses œuvres qui puissent durer au moins un mois.
En effet, l’homme moderne à un temps d’attention d’environ 4 secondes.
Les réseaux sociaux nous ont habitués aux contenus rapides et interchangeables. Le marché est aussi en demande constante de retour et de nouveaux sujets à présenter.
La qualité dans les œuvres, comme le faisaient avec brio les anciens maitres, est donc beaucoup plus compliquée à atteindre pour les nouvelles générations d’artistes.
La relation que nous avons avec l’image, sa diffusion et sa consommation a évolué au fil des années.
Cependant, la peinture reste une activité unique et à part entière pour Nicola Samorì.
“ La peinture est une activité sale, érotique, brute et indéracinable. ”
Il ne se considère pas comme un peintre figuratif. Néanmoins, il ne sera jamais assez lâche pour créer une œuvre aniconique, dénuée de sens.
Il souhaite que ses œuvres persistent dans la mémoire de ses spectateurs… Alors qu’à contrario, il souhaite mourir sans laisser de trace.
Donc pour conclure…
Quelles sont les qualités d’une œuvre majeure selon Nicola Samorì ?
Ne pas vieillir, quel que soit le temps qui passe.
À vos pinceaux.
Nicola Samorì : Site officiel
